3 mai 2017 | Le Journal de Montréal | Mathieu Bock-Côté
Depuis près de 20 ans, une question hante régulièrement les instances du Parti québécois: faut-il oui ou non appliquer la loi 101 au niveau collégial?
Deux
camps s’affrontent inégalement.
Le
premier camp, minoritaire mais pugnace, croit que la chose est nécessaire.
Son avis?
Il n’est pas normal que les jeunes, et notamment les jeunes immigrés, une fois
leur secondaire terminé, puissent sortir tout simplement des institutions du
Québec francophone, comme s’ils pouvaient enfin se délivrer d’une culture qui
ne les intéresse pas vraiment.
La
francisation ne consiste pas seulement à apprendre le français mais à
s’intégrer culturellement à la majorité historique francophone.
CÉGEP
Pourquoi
les Québécois devraient-ils financer leur anglicisation comme peuple à même
leurs fonds publics?
Les
institutions anglophones sont là pour assurer les droits historiques de la
minorité anglaise, et non pas pour créer une société bilingue.
Les
promoteurs du cégep français ajoutent: si nous ne donnons pas un sérieux coup
de barre pour redresser la situation, le français deviendra minoritaire à
Montréal.
Le
deuxième camp rassemble l’establishment péquiste, qui a décrété depuis
longtemps que l’application de la loi 101 au collégial était une mesure
extrémiste.
Elle
serait exagérément sévère et laisserait croire à une radicalisation du PQ. Elle
ferait même fuir les électeurs. On aurait envie de répondre que le
souverainisme bon chic bon genre y est parvenu sans aide.
Les
élites péquistes nous disent: encourageons les jeunes à aller au cégep français
mais ne les obligeons pas. Un mauvais esprit leur rappellera que c’était la
position des adversaires de la loi 101 au moment de sa promulgation il y a 40
ans.
Ne nous
faisons pas d’illusion: le deuxième camp l’emportera.
La vraie
question est simple: le Québec doit-il être une société française ou une
société bilingue?
Est-ce
que le français doit clairement prédominer ou ne doit-il être qu’une langue sur
deux, à laquelle on accorderait peut-être un petit avantage symbolique sans
trop de conséquences pratiques?
Est-ce
que nous considérons que tout ce qui pouvait être fait pour imposer le français
comme langue commune a été fait? Nos élites le prétendent.
Certaines
personnalités croient même venu le temps d’angliciser la vie publique au nom de
l’ouverture aux anglophones et aux communautés culturelles.
On a
récemment vu Amir Khadir poser une question en anglais à Martin Coiteux, qui
lui a d’abord répondu en français, avant de s’en excuser! Ce qui est moderne,
chez les décideurs, c’est la régression du français.
Il
faudrait lancer une offensive très vigoureuse pour redresser la situation
linguistique.
FRANCHISE
Dire
clairement qu’à Montréal, la situation est catastrophique.
Dire
franchement que notre disparition comme peuple est enclenchée.
Dire que
la jeunesse est en train de se perdre dans un franglais qui n’est qu’un
dialecte de colonisés fiers de l’être.
Mais cela
n’arrivera malheureusement pas.
Qu’est-ce
que la modération politique au Québec?